Ce que révèle cette plongée dans la violence inter-quartiers à Bordeaux, c’est la fragilité d’une jeunesse sur le point de basculer dans l’ultra violence.
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S’il fallait cibler un mal en particulier à l’issue de cette enquête, sans doute la prévention de la récidive, et plus précisément encore celle des mineurs, devrait-elle être au cœur de toutes nos préoccupations. Seule notre volonté collective d’interrompre précocement ces parcours de délinquance identifiés, de reprendre en main des gamins qui se laissent glisser sur la pente du crime, nous permettra d’éviter le scénario du pire : un embrasement incontrôlable qui menace plus que jamais de nombreuses cités de la Métropole.
C’est sans doute ce constat qui a conduit le conseil municipal à ressortir une proposition issue du programme… de Nicolas Florian ! Le rappel à l’ordre donne au maire, en sa qualité d’officier de police judiciaire, la possibilité d’intervenir auprès d’une personne mineure, coupable d’atteinte au bon ordre, à la sûreté ou à la sécurité dans la ville. Son promoteur, Amine Smihi, justifiait la mesure : « En partenariat avec le Parquet, le rappel à l’ordre sera mis en place à Bordeaux et centré sur les mineurs. Notre intention vise à les responsabiliser afin de limiter le nombre de faits restés sans suite. Ce sera aussi l’occasion d’accompagner les parents dans l’éducation de leurs enfants et de leur proposer un suivi de nos services ». Une mesure « pas à la hauteur des enjeux » pour Aziz Skalli de La République En Marche. Des « leçons de morale » inutiles, pour Philippe Poutou de Bordeaux en Lutte, toujours défavorable à l’augmentation de la présence policière. Peut-être. Mais aussi le signe, bienvenu, que la problématique de la délinquance des mineurs est prise en compte.
Pour conclure, soyons lucides : nous n’échapperons pas, tôt ou tard, à un affrontement avec les bandes qui sévissent d’ores et déjà à Bordeaux. Face à la montée de l’armement aux Aubiers et à Chantecrit, certes, mais surtout à Grand Parc et à la Benauge, véritables plaques tournantes du trafic de drogue, la lutte sera âpre, difficile. Et nécessitera des frappes chirurgicales pour éviter l’embrasement. Ce combat est vital, car ce sont ces quartiers qui produisent l’essentiel de la délinquance que l’on retrouve dans les centre- villes : deals, agressions, cambriolages, etc. Et seul le démantèlement des bandes saurait ouvrir la voie à un traitement social et éducatif de ces problématiques. Car sans sécurité, toute politique de la ville, aussi généreuse et solidaire soit-elle, est vouée à l’échec.
Aujourd’hui, c’est vers la justice que sont tournés tous les regards. Son rôle sera en effet primordial dans les semaines à venir. Car même si les individus mis en examen dans le cadre de cette affaire devaient être condamnés, une peine jugée relative pourrait être explosive.
« Avec le couvre-feu et à cause du meurtre, y’a presque personne dehors »
Kim
Kim, notre ado de 16 ans, raconte l’ambiance pesante, mais aussi la chaleur humaine, la solidarité, qui se sont exprimées dans les quartiers suite à ce drame : « Les jeunes de la cité sont tristes. Ils se retrouvent régulièrement chez la maman de l’un des petits garçons blessés lors de la fusillade. Ils parlent de Lionel, ils ont fait des gourmettes et des maillots de foot de la Côte d’Ivoire à son nom ».
Depuis la terrible fusillade du 2 janvier, les Aubiers et Chantecrit tournent au ralenti. Même le Four semble être à l’arrêt. « C’est étrangement calme en ce moment » confirme un agent de la BAC. Pour tous les habitants de Chantecrit et des Aubiers, pour tous les travailleurs sociaux, les éducateurs, les médiateurs, les commerçants du quartier, pour toutes les familles qui envoient leur gamin à l’école la peur au ventre, pour tous les profs qui les accueillent, pour toutes les mères dont les fils ont été blessés, pour la famille de Lionel, espérons que ce calme ne soit pas annonciateur d’une terrible tempête.
DERNIÈRE MINUTE
Le 3 février, dans le quartier Chantecrit, deux jeunes hommes ont été poignardés à plusieurs reprises, après avoir été pourchassés et acculés au dernier étage d’un immeuble, dans lequel ils avaient trouvé refuge. D’après nos informations, l’une des deux victimes de cette agression à l’arme blanche serait l’un des cinq individus interpellés après la mort de Lionel. Remis en liberté faute d’éléments probants, son casier judiciaire se- rait chargé, faisant notamment état de vols à main armée avec violence. La deuxième victime serait, elle aussi, bien connue des services de police.
L’épisode précédent de notre enquête, « Les nouveaux caïds » est à lire ici: « Un flingue, c’est moins cher qu’une PlayStation »